Vitaly Malkin
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Lecture : Laura Kipnis, Unwanted advances: Sexual Paranoia comes to campus, 2017

    Photo by Philippe Bout on Unsplash

    Photo by Philippe Bout on Unsplash

    Je parlais, au sujet d'un autre livre, de la libération sexuelle, intervenue dans la seconde moitié du XXe siècle, comme d’un bienfait. Mais force est de constater que ce ne sont en rien des acquis. C’est ce que nous montre l’essayiste et critique culturelle Laura Kipnis dans un livre récent. Elle y dépeint l’atmosphère des campus des Universités américaines et le puritanisme qui y règne. À la lecture, on se demande si l’on est bien dans l’Amérique d’aujourd’hui ou face à l’Inquisition espagnole du XVe siècle.

    Ce qui me frappe le plus dans le livre de Laura Kipnis, c’est sa manière de mettre en lumière la complexité des relations sociales. Lorsque nous sommes attirés par quelque chose ou quelqu’un, nous avons parfois du mal à l’exprimer d’un bloc. Nous ne disons en vérité qu’assez rarement : « J’aime absolument ceci ou cela. » Voilà qui vaut aussi dans les relations humaines et dans l’attirance sexuelle. Or le puritanisme des campus américains, que Kipnis décrit à merveille, annihile totalement cette complexité des sentiments et des affects. C’est ce qu’elle nomme la « culture de la paranoïa sexuelle ». Polarisées entre les figures de « l’agresseur » et « la victime » potentiels, toutes les relations élèves-étudiants sont en permanence suspectes de violences sexuelles dissimulées.

    Pire ! Les relations sexuelles ayant effectivement eu lieu entre deux personnes consentantes peuvent, être après-coup, considérées comme des « agressions ». Pour quelle raison ? Par ce que, après-coup, la jeune femme se demande si elle était véritablement consentante. Mais alors que signifie être « véritablement consentant » ? Y a-t-il un élément tangible qui puisse assurer ce consentement ? Faudra-t-il bientôt signer un contrat avant d’avoir une relation sexuelle ? La question peut sembler n’être qu’une expérience de pensée. Et pourtant, une application nommée CNCNT a bien vu le jour aux États-Unis pour formaliser concrètement le consentement de deux personnes désirant avoir une relation sexuelle. On ne peut en réalité qu’être effrayé par la sociabilité orwellienne de ce type de pratiques. Car en effet, la simplicité et la naturalité sont et restent le fondement des relations sociales saines. Le sentiment de proximité et complicité qui existe dans les relations amicales ou érotiques pourra-t-il survivre à un tel excès de contractualisme ?

    Au fond, derrière la multitude de faits très richement documentés, le livre de Laura Kipnis pose une vraie question : comment identifier et se protéger des ravages du puritanisme ? Dans le sillage de Metoo, cette question est d’une brûlante actualité.

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